Une chose est sûre, l’asbl Labeur n’a pas volé son nom : chaque jour, les artisans de l’asbl gantoise sont prêts à (re)construire et rénover, dans un souci de durabilité. Aménagement, plafonnage, carrelage, peinture… L’association fait de tout ! Nous n’avions plus une minute à perdre pour nous entretenir avec le créateur de différence Jonas Tournicourt, coordinateur de Labeur !
Dites-nous Jonas, qu’est-ce que Labeur propose exactement et comment tout a commencé ?
Jonas: « La ville de Gand a créé l’asbl Labeur à la fin des années 90. L’idée était de remettre au travail des personnes qui avaient du mal à trouver un emploi. C’est un lieu de travail social, donc, qui s’est principalement concentré sur la (re)construction et l’aménagement, ou du moins, sur des travaux de finition. À l’époque, les commandes provenaient exclusivement de la ville. Il s’agissait de travaux de peinture, de décoration… Nous avons commencé il y a plus de vingt ans avec une toute petite équipe, mais, d’année en année, nous avons vu l’asbl s’agrandir pour devenir une grande équipe diversifiée de plus de soixante personnes. Certains travaillent chez Labeur toute leur vie, d’autres y font du volontariat temporaire ou un stage jusqu’à ce qu’ils soient à nouveau prêts pour un ‘vrai’ travail. Depuis la création de l’asbl, nous ne travaillons plus seulement pour la ville, mais aussi pour des particuliers. Ces dernières années, un atelier de fabrication de meubles et une équipe logistique ont été mis sur pied. Mais la mission de l’asbl est toujours la même : donner à chacun la chance de trouver un emploi. »

Labeur n’a pas seulement une vocation sociale, l’écologie est aussi importante pour l’asbl. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Jonas: « Je n’irais pas jusqu’à dire que l’écologie est notre marque de fabrique. En 2022, il est encore très difficile qu’une entreprise de construction soit ‘écologique’. Cela dit, nous aimons travailler avec des matériaux organiques et recyclés, mais la réalité est que cela reste un secteur de niche.
Il est vrai que nos clients choisissent Labeur parce que la durabilité est primordiale pour nous, mais il ne s’agit pas seulement de préserver le climat et la planète. Cependant, nous sommes vraiment déterminés à réfléchir à ce qui pourrait être amélioré à l’avenir, à long terme. À Gand, vous trouverez des dizaines d’entrepreneurs qui travaillent sur le développement durable et qui peuvent compter sur le soutien de Labeur. Par exemple, la petite entreprise de construction écologique HuisMus ou Tintelijn, une entreprise spécialisée dans la peinture durable qui vend aussi des peintures naturelles. Nous nous consacrons également pleinement à la démolition et au démantèlement de toutes sortes de matériaux de construction, que nous réutilisons par la suite. Par exemple, nous pouvons fabriquer un plan de travail ou un meuble à partir de déchets de bois dans notre atelier de fabrication de meubles. »
Le particulier est-il prêt à acheter un plan de travail réalisé à partir de « déchets » ?
Jonas: « La plupart des gens achètent encore du neuf. Les matériaux recyclés sont souvent étiquetés (à tort) comme étant ‘laids’ et ‘sales’. Ces préjugés sont tenaces. Ce sont surtout les ‘pionniers’ et les jeunes générations qui optent pour des alternatives durables, y compris pour la construction et l’aménagement de leur logement. »

En tant que consommateurs, comment pouvons-nous faire de meilleurs choix en matière d’aménagement ?
Jonas: « Tout commence par un bon architecte. Il faut une personne qui soit ouverte à l’aspect écologique. La conception doit être pensée pour être réutilisée : vous pourrez alors faire de meilleurs choix. Il n’est pas encore intéressant pour les grandes entreprises de construction d’investir pleinement dans ce secteur de niche, car la demande n’est pas suffisante à l’heure actuelle. C’est ce cercle vicieux que nous espérons rompre avec Labeur. Si vous êtes curieux de savoir ce qui est déjà possible aujourd’hui, jetez un œil sur le site d’Opalis. Vous y trouverez un aperçu de tous les matériaux durables disponibles. »
Vous êtes convaincu de l’importance de la durabilité. Au sein de votre association aussi c’est important ?
Jonas: « Absolument ! Nous recherchons toujours des alternatives durables, mais c’est aussi un défi. Par exemple, nous n’avons pas encore de panneaux solaires, car cet investissement est trop important pour nous actuellement. Par contre, nous réfléchissons à un système de récupération d’eau de pluie et la moitié de notre flotte est déjà électrique. Avec l’augmentation des prix du carburant, ce n’est pas un investissement négligeable. »
Quels sont vos projets d’avenir pour Labeur ?
Jonas: « L’accent sera toujours placé sur l’aspect social, mais nous espérons rendre l’industrie de la construction un peu plus verte à l’avenir en cassant le cercle vicieux dont je vous ai parlé. Comment ? En nous concentrant sur des projets pilotes d’‘exploitation minière urbaine’ (le recyclage de matières premières précieuses extraites des déchets de la ville), pour vous donner un exemple. »

Vous faites des choix responsables dans votre vie personnelle aussi ?
Jonas: « Bien sûr ! Chez Labeur, tout le monde a conscience des objectifs de développement durable que nous nous engageons à atteindre en tant qu’entreprise. Si vous n’êtes pas convaincus de l’importance de ces objectifs, pas la peine de travailler chez Labeur. Par exemple, notre coordinateur ‘Rénovation’ a nettement privilégié l’utilisation de matériaux bio-organiques lors de la rénovation de sa maison : isolation en liège pour sa façade extérieure, chaux de chanvre pour l’intérieur et enduit d’argile sur les murs. Au fait, saviez-vous que presque tous nos employés viennent travailler à vélo ? »
Vous avez un dernier conseil à partager avec nos lecteurs en matière de durabilité ?
Jonas: « Ne vous accrochez pas aux idéaux conventionnels et osez faire preuve d’un peu plus d’audace dans les choix que vous faites. Si tout le monde continue de rêver d’avoir un plafonnage blanc et bien lisse sur ses murs, rien ne changera jamais. Vous ne pourrez obtenir de tels murs qu’en les plafonnant, et il n’existe pas d’alternative écologique pour cela. Si vous êtes prêts à accepter que vos murs soient un peu moins blancs, un peu moins lisses et un peu moins parfaits, les possibilités sont tellement plus nombreuses. »